Fishbach, l’espoir vibrant

Deux mois après la sortie de son premier disque, Flora Fishbach pose un regard malicieux sur son vécu en tant qu’artiste, ses envies et ses projets. Rencontre.

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Flora Fishbach ©Olivier Juszczak

Jeune chanteuse de 24 ans, Fishbach a sorti son premier EP « Tu vas vibrer », le 6 novembre 2015. Elle enchaine depuis les concerts en première partie, en attendant sa vraie première date en solo sur Paris, le 21 mars au Point Éphémère. Classée dans les espoirs 2016 par Les Inrockuptibles, elle revient avec nous sur ses débuts, ses ambitions, les sollicitations médiatiques et son approche du métier d’artiste.

  • « Je me suis mis à crier, très fort, et je me suis rendu compte que c’était un exutoire de dingue, que je ne voulais faire que ça. »

Après avoir enchainé plusieurs petits boulots, comme vendeuse, ouvreuse, photographe de sport, Fishbach commence la musique en fondant Most Agadn’t sur l’idée d’un musicien de métal « hors du temps » rencontré après son concert. Elle a 17 ans, aucune expérience, mais se souviendra toujours de la première fois où elle a branché « son petit synthé Yamaha à 100 francs avec une pédale d’effet sur un ampli ». Un déclic s’opère. Une ambition est née. Pendant quatre ans, ils partagent la scène jusqu’au jour où, après un concert, ils se regardent et comprennent tout de suite que c’est fini : « on a pas pris notre pied, on s’est regardé, et on a dit : « on arrête ! » ». Fishbach allait naitre quelque temps plus tard, toute seule dans sa chambre, au contact d’un Ipad et du logiciel GarageBand.

  • « On est en train de préparer l’album, pour 2017 j’espère ! »
Fishbach officielle ©Melanie Bordas Aubiès

Fishbach ©Melanie Bordas Aubiès

Je rencontre Flora dans un café du XIème où il fait bon continuer à vivre. Elle m’avoue avoir signé pour trois albums avec son label Entreprise. Évidemment, une clause dépendant de la réussite de chacun est intégrée. C’est grâce à son « ingé son » actuel, rencontré lorsqu’elle travaillait à La Cartonnerie, qu’elle s’est décidée à envoyer ses maquettes. Une semaine après elle signait un contrat.

  • « Je resterai quand même le maitre d’orchestre de tout ce petit monde »

Actuellement en studio pour la préparation de son premier album, elle me confie qu’elle est aussi en train de monter un « backing band » parce ce que « c’est bien d’avoir les deux formules » seule ou en groupe, et de temps en temps « se séparer des bandes enregistrées » pour une performance plus « live ». Décidée, elle ne veut pas avoir des musiciens uniquement exécutifs mais souhaite rester le chef d’orchestre. Quand j’évoque les comparaisons souvent attribuées avec Catherine Ringer ou Désireless, elle me répond que « les gens ont besoin de référence » et que « tout a été fait, on peut simplement réinventer et se réapproprier les choses ».

  • Les Inrocks, hors série de décembre 2015, Les 100 meilleurs albums de l’année.

…la Française s’impose, jusqu’au malaise : danse affolée, corps au fusain et regard fou qui transperce chaque spectateur.

Amusée par cette citation, Fishbach reconnait qu’elle apprécie créer une forme d’inquiétude chez les gens. C’est d’ailleurs ce qu’elle aime dans l’art : « réussir à percuter, que ça soit dans le bien ou dans le mal ». Quand elle parle « du grand public » qu’elle « aimerait atteindre un jour », on sent une forme de détachement à toute forme d’ambition déraisonnable. Elle me confie d’ailleurs qu’elle croise « des petits cons qui ne feront pas long feu », persuadée que sa gentillesse lui permettra de durer dans le métier en prenant l’exemple de Cléa Vincent. Elle n’en fait d’ailleurs pas une obsession car elle m’avoue que « dans 10/15 ans » elle « se voit bien monter une boite d’art thérapie » car « c’est un vrai objectif de vie ».

  • « Je réponds toujours mais je ne peux pas entamer des conversations et des amitiés virtuelles. »

Concernant la gestion de sa page Facebook, Fishbach me raconte que son manager est aussi administrateur. Elle reçoit une demande accrue de concerts, et elle a « du mal à refuser les choses et parfois trouver les bonnes formules ». C’est le cas sur Paris en attendant sa première salle au Point Éphémère le 21 mars 2016.

Elle m’avoue aussi qu’elle rédige toutes les réponses en demandant parfois des conseils à son manager. Il y a quelques fois des messages de fans assez étranges. Médiatiquement, Flora Fishbach a eu le droit à sa première télé au Petit Journal de Canal Plus. Malheureusement non diffusée à cause d’une interview trop longue de l’invité en plateau qui a empiété sur la fin de l’émission, elle aura une deuxième chance en mars. Sur cette expérience, elle explique que « c’était juste un one shot et tu sais que c’est figé pour toujours, très impressionnant, et que la France est devant ». Concernant sa relation avec les journalistes, elle me dit qu’elle « aime bien rencontrer des gens, se présenter » même si c’est un peu à « sens unique ». Puis elle affirme : « on aime toujours parler de soi ! Même si c’est un peu horrible ce que je raconte, mais je suis très contente de ce qui m’arrive, je sais que c’est le jeu, et j’aime jouer ce jeu ».

  • « Quand tu dis je, c’est des fois plus facile de s’approprier les mots d’un autre sur ton histoire. »

En évoquant le morceau « Béton mouillée », elle me confirme qu’il y a forcement une petite part d’autobiographie même si ce n’est pas elle qui a écrit les paroles mais Olivier Vaillant, un pote. Le thème de départ était : « je rentre de soirée, est ce que je rentre seule ou pas ? ». Le texte est « assez alambiqué » et « il peut avoir plusieurs lectures ». Elle écrit de plus en plus ses chansons.

  • « J’aime beaucoup la musique de femmes, les femmes artistes »

Avant de mettre fin à notre entretien, je lui ai demandé si elle avait un ou deux coups de cœur à partager. Elle m’a répondu qu’elle avait pleuré devant un concert de Michelle Blades, et qu’elle conseillait le morceau « Amérique » de Mathilde Fernandez, « la vraie héritière de Catherine Ringer ».

Malicieuse, sympa et très abordable, Fishbach possède cette forme d’ambition raisonnable qui la mènera surement loin. Talentueuse, jolie, bonne cliente en interview, elle dégage un bien être communicatif qui symbolise sa joie de vivre. Elle a l’air simplement heureuse de ce qui lui arrive et profite de chaque moment. Toutes ces premières fois attendues avec impatience et un soupçon de stress qui permettent de pimenter l’envie.

Olivier Juszczak

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